Inondations du Grand Morin, pistes pour l’adaptation du bassin versant au dérèglement climatique
La vallée du Grand Morin constitue un territoire doté d’une identité propre autour des « Venise vertes » de sa vallée, en contrebas de ses plateaux agricoles ; relativement isolée elle se distingue par son comportement hydrologique particulier. Le Grand Morin connait des montées des eaux rapides, notamment en cas d’averses intenses à caractère orageux et localisé. L’écoulement des eaux y a été géré, de longue date, avec des systèmes de drainage sur les plateaux agricoles et des biefs et seuils dans les vallées où se situent les bourgs. Cela n’empêche pas, voire aggrave, des inondations répétées qui ont conduit à une certaine acceptation, voire, à certains endroits comme la confluence avec la Marne, à une culture du risque qui favorise la mise en sécurité dans les maisons ou des évacuations bien organisées. Lors du passage de la tempête Kirk sur la France en octobre 2024, le bassin a connu trois jours en vigilance rouge pour inondation. Plusieurs secteurs inondés l’avaient déjà été à trois reprises dans l’année. Ces inondations, de par leur répétition rapide et leur ampleur, ont soulevé des questions nouvelles, tant sur leurs causes que sur le risque d’aggravation dans les années à venir. En particulier, le ruissellement agricole apparait comme un enjeu à part entière. Le Syndicat mixte d’aménagement et de gestion des eaux (SMAGE) porte depuis plusieurs années la compétence de « gestion des milieux aquatiques » souvent perçue, à tort, comme distincte voire concurrente de la prévention des inondations. Les complémentarités entre prévention des inondations, urbanisme et gestion des eaux pluviales ne semblent pas encore organisées. La compétence ruissellement n’est pas encore structurée alors que ce phénomène aggrave les débordements. Le transfert de la compétence « prévention des inondations » au SMAGE a été compris comme un retrait de toute action convergente de la part des autres et apparait comme un frein majeur à l’accélération demandée de cette politique, tout comme la difficulté du SMAGE à accéder au foncier agricole. Dans le calendrier de la mission, plusieurs avancées ont été réalisées cependant des axes d’amélioration se dégagent : la mobilisation élargie des acteurs notamment dans le secteur agricole et la mise en place d’une gouvernance pérenne ; l’utilisation de tous les leviers de l’aménagement, pour travailler en cohérence, dans les parties urbanisées, agricoles et naturelles ; la prise en compte, autant que possible, de l’évolution des aléas pour travailler sur la réduction de la vulnérabilité du territoire ; l’identification des zones à inondation fréquente pour y développer une approche adaptée, en complément de la prévention des risques. Le Grand Morin pourrait ainsi devenir un territoire d’expérimentation d’une prévention des inondations élargie à une démarche d’adaptation aux dérèglements climatiques en milieu rural.
Auteurs : Isabel DIAZ, Laure TOURJANSKI - IGEDD
Publié le 2 décembre 2025