Publication du rapport "Prévenir les violences et apaiser les tensions pour mieux partager la voie publique"

Le drame survenu en octobre 2024 – la mort brutale de Paul Varry, un jeune cycliste tué volontairement à Paris par un automobiliste – a agi comme un électrochoc national. Ce drame a profondément ému la communauté cycliste et a ravivé les tensions croissantes entre les différents usagers de l’espace public, notamment entre automobilistes, cyclistes et utilisateurs d’engins de déplacement personnel motorisés (EDPm). Il a mis en lumière les tensions croissantes entre les usagers, chacun revendiquant sa place dans un espace urbain de plus en plus encombré et souvent mal conçu pour la diversité des mobilités.

Dans ce contexte, une mission pilotée par Emmanuel Barbe, appuyé par Christel Fiorina et Clara Herer au titre de l’IGEDD, a mené durant six mois des investigations, rencontré une centaine d’acteurs, organisé un dialogue citoyen pour dresser un état des lieux sans complaisance sur la situation. Leur rapport propose une série de recommandations pour mieux partager l’espace public.

Premier constat : l’incompréhension règne. Peu d’usagers connaissent les règles propres aux autres modes de transport alors que le code de la route évolue en continu, et tous ont le sentiment d’être injustement ciblés par la répression routière. Ce manque de culture commune du partage provoque frustrations et accidents. Pour y remédier, les auteurs suggèrent de renforcer la communication sur les règles de circulation et d’améliorer la transparence sur les contrôles grâce à des statistiques précises et à la vidéoverbalisation.

Deuxième constat : à l’échelle européenne et malgré la loi LAURE qui rend obligatoire la création d’itinéraires cyclables en agglomération, la France accuse un retard important dans le développement d’infrastructures de qualité et l’Etat s’est désintéressé de cet enjeu décentralisé. Trop peu nombreuses, mal connectées ou dangereuses, le manque d’infrastructures freine la transition vers les mobilités douces. Le rapport plaide pour une stricte application de l’obligation qui est faite aux collectivités de réaliser les aménagements pour les cyclistes en agglomération et une extension de la mesure hors agglomération. Pour ce faire, elle recommande que l’Etat continue de financer ces aménagements via le plan vélo et soutient la création de zones 30 en ville. Enfin, elle propose de faire de certaines recommandations du CEREMA des normes afin de favoriser l’émergence d’aménagements cyclables cohérents et lisibles, avec couleur unique, sas vélo marqués, règles de priorité aux intersections communes et continuités assurées. Hors des centres urbains, il propose que les automobilistes soient obligées de changer totalement de voie pour dépasser un cycliste, à l’image de l’Espagne. S’agissant des personnes à mobilité réduite, la mission recommande

Troisième levier : la formation. Le "savoir rouler à vélo", déjà en place dans certaines écoles, doit être étendu à tous les enfants. Les adultes, eux, pourraient se former via leur compte personnel de formation. Et les futurs conducteurs devraient, dès le permis, apprendre à cohabiter avec tous les usagers.

Enfin, un changement culturel est jugé indispensable. Renommer le "Code de la route" en "Code de la voie publique" serait un geste fort pour reconnaître la pluralité des mobilités. De même, il est proposé que la publicité sur les automobiles reflète mieux la réalité des déplacements dans un espace public partagé, cesse de glorifier la puissance et la vitesse et mette l’accent sur le nécessaire partage de la route.

La mission invite aussi à s’appuyer sur la technologie pour réconcilier les mobilités : auto-signalement des cyclistes, sonnettes spécifiques sur les voitures, et GPS intelligents capables de prendre en compte les plus vulnérables.

Face à la nécessité urgente de faire baisser les violences et incivilités sur la route, le rapport trace une voie ambitieuse : celle d’un espace public mieux pensé, mieux partagé et, in fine,pacifié.

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